Tarte de Pâques à la semoule et aux raisins secs dite « Flàde » de Lucien Geschang

Flàde ou Oschterflàde

Tarte de Pâques à la semoule et aux raisins secs dite « Flàde » ou « Osterflàde »
© Lucien Geschang

La tarte de Pâques garnie d’une bouillie de semoule et d’une grande masse de raisins secs, dite Flàde ou Oschterflàde, est réalisée avec une pâte levée et recouverte d’une bouillie de semoule nommée Babb ou Griesbabb. Lucien Geschang la confectionnait chaque année dans sa boulangerie de Geispolsheim à l’approche de Pâques.

Le mot Flàde peut surprendre car, si aujourd’hui il désigne surtout une tartine (e Bùtterflàde, une tartine de beurre, par exemple), il rappelle ici surtout sa signification ancienne, en vieil allemand, qui désignait une tarte plate (ein flacher Kuchen, précise le dictionnaire étymologique allemand)

Lucien Geschang, boulanger en 4e génération à Geispolsheim, a perpétué cette tradition jusqu’à sa prise de retraite à la fin 2019. Son pain et ses spécialités manquent à Geispolsheim : plusieurs internautes me l’ont fait savoir.

Par chance, Lucien Geschang a bien voulu me révéler sa recette.

Son arrière-grand-père venu d’Urmatt s’était installé dans la boulangerie par le mariage avec une fille de Geispolsheim. Lui ne réalisait pas cette tarte car, autrefois, c’était les femmes de Geispolsheim qui la préparaient chez elle, sur des plaques rectangulaires de grande taille -75 cm de long sur 50 cm de large- (les mêmes que celles utilisées pour le Brieli, la tarte flambée de Geispolsheim faite aux grattons, mìt Griewe, une autre spécialité de Geispolsheim que réalisait Lucien Geschang).

Depuis que Lucien Geschang a fermé la boulangerie, André Kircher réalise lui-même des « Flàde ».
Ici, il l’a photographié avant enfournement © André Kircher

Les ménagères apportaient ensuite la tarte au boulanger afin qu’il la fasse cuire dans un four après la cuisson du pain, la température étant alors idéale.

Autrefois, cette tarte était cuite le Vendredi Saint mais elle n’était dégustée qu’à la fin du carême. Comme le Vendredi Saint se situe en temps de carême, la tarte n’était dégustée qu’à Pâques et le lundi de Pâques.

Aujourd’hui on la déguste avant Pâques et, dès lors que Lucien proposait des portions dans sa vitrine, elles partaient comme des petits pains !

Notez que des desserts de Pâques nommés Osterflàde sont proposées en d’autres régions (notamment dans la région d’Ittenheim, comme dans le Kochersberg et dans le Pays de Hanau). Cette tarte se fait parfois avec l’ajout de safran et de cannelle. Ces tartes sont essentiellement faites pour Pâques, parfois pour Pentecôte.

Voici le « Flade » une fois cuit. Cette tarte du temps pascal ne reste pas longtemps intacte,
car elle est vite entamée et dévorée © André Kircher

Il y a quelques années, j’avais évoqué cette recette sur France Bleu Elsass. Suzanne Barth, une auditrice de Furdenheim, téléphona au cours de l’émission pour dire que sa belle-maman originaire de Furdenheim faisait régulièrement ce gâteau qu’elle appelait Griesmüesküeche (gâteau à la bouillie de semoule).

Un internaute, Jean-Michel Lerch, précise qu’à Mutzig la bouillie de semoule est parfumée à la cannelle et les raisins secs sont macérés dans le schnaps.

Voici la tarte de Pâques dite « Flàde » d’Yvette Jost qu’elle saupoudre de cannelle :
elle fait remonter toute l’émotion de l’enfance © Yvette Jost

Une internaute suisse, Adeline Meriem Wid, a apporté cette précision sur ma page Facebook :
Les « Osterfladen » sont une spécialité de Suisse commercialisée dans toutes les bonnes pâtisseries suisses ou à la Migros. Je pense que cette tarte vient de Bâle. En Suisse, on appelle ces gâteaux « Osterfladle ».

La recette suisse et l’alsacienne se donnent la main. Ce qui prouve (s’il fallait encore le démontrer) que l’Alsace fait partie d’un grand espace alémanique où les frontières n’existent que sur les cartes géographiques.

pour une grande tarte de 44 cm de diamètre (ou 2 petites d’une vingtaine de cm de diamètre)

pour 600 g de pâte levée
  • 500 g de farine
  • 2 g de sel
  • 125 g de sucre
  • 1 œuf
  • 2 dl de lait
  • 20 g de levure boulangère
  • 125 g de beurre
pour la garniture à la semoule et aux raisins secs (dite « Babb » ou Griesbabb) qui peut être préparée la veille
  • 1 l de lait
  • 180 g de sucre
  • 80 g de semoule de blé fine
  • 500 g de raisons secs (sultanines de préférence) à faire tremper pendant 10 h dans de l’eau

Dans un saladier, mélangez la farine, le sel, le sucre et l’œuf. Ajoutez au fur et à mesure le lait, mélangez bien, ajoutez la levure émiettée, travaillez ce mélange jusqu’à ce que la pâte soit bien uniforme et jusqu’à ce qu’elle se détache du moule.

Laissez reposer la pâte pendant au moins une heure

Préparez de préférence la veille la garniture à la semoule et aux raisins secs (dite Babb ou Griesbabb)afin qu’elle ait le temps de refroidir. Les raisons secs doivent tremper dans de l’eau pendant 10 h puis être égouttés.

Portez le lait à ébullition avec le sucre, ajoutez en pluie la semoule, remuez avec une spatule en bois, veillez à ne pas avoir de grumeaux. La bouillie ne doit pas être compacte mais plutôt liquide lorsqu’elle est chaude. Elle deviendra ferme en refroidissant. Lorsqu’elle est refroidie, ajoutez les raisins secs trempés et égouttés. Ajoutez les raisins secs et mélangez-les à la pâte.

Etalez la pâte finement (sur une épaisseur d’environ 4 mm), pour l’abaisser, procédez patiemment en plusieurs temps sans chercher à l’étirer trop vite (car elle se rétracterait à la cuisson). Versez la bouillie de semoule aux raisins secs refroidie.
Enfournez à 190° th 6-7) pendant environ 20 à 30 minutes en ayant un œil sur le four.

La pâte doit être dorée et bien cuite.

Dégustez tiède ou froid, telle quelle, ou avec un café ou un verre de vin blanc.

Joyeuses Pâques !

Frelichi Ostere !

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