Sonate à Catherine

L’ÉTÉ DE MES VINGT ANS

J’ai rencontré Catherine Kreutzer à la rédaction du journal, les DNA, au cours de l’été 1973. J’avais 20 ans. Elle en avait 67. J’étais étudiante en journalisme et j’entamais un stage de deux mois dans ce journal. Elle y travaillait comme rédactrice et, parallèlement, était auteur d’une centaine de romans d’amour et d’une multitude de poèmes écrits en allemand. Originaire de Halle, une ville d’Allemagne Orientale incluse en 1945 dans la zone d’occupation soviétique, elle était devenue alsacienne par son mariage avec l’artiste-peintre strasbourgeois, Leander Kreutzer.

Entre elle et moi a fleuri sur-le-champ un sentiment vif, sécant, intense. C’était plus que de l’amitié, c’était autre chose que de l’amour. Quelque chose de pur, de solide, de brut comme le cristal de roche. Pour le caractériser, il me vint spontanément à l’esprit le mot de syntonie qui désigne en physique “l’égalité de fréquence des oscillations libres”. Je détestais la physique, mais j’aimais Catherine et l’été de mes 20 ans. J’ai écrit ce livre, portée par une exaltation comme rarement la vie nous permet d’en connaître.

Catherine est morte en juin 1994. C’était en cette saison riche en parfums où les fragrances de roses se mêlent à celles du seringat. Une année a passé. Et en juin 1995, les parfums mêlés de roses et de seringat m’ont donné un élan bouleversant. J’ai écrit pendant une semaine, sans m’arrêter, sans m’accorder de sommeil, craignant que l’inspiration s’enfuit.

J’ai ensuite rangé les textes dans un tiroir et n’y ai plus touchés pendant trois ans. Curieusement, dans ma mémoire, ils étaient restés à l’état d’ébauche. Quelle ne fut ma surprise en ressortant ces textes de voir qu’ils étaient achevés, qu’il n’y avait rien à changer. Je les ai proposés à Bernard Reumaux, le directeur de la Nuée Bleue.

Cette acceptation fut importante pour moi : le livre « Prévert en alsacien » m’avait permis une première reconnaissance pour un texte littéraire, éloignée de l’image uniquement gourmande que je renvoyais au public. A partir de ce livre «Sonate à Catherine », j’ai pu alterner entre manuscrits littéraires et manuscrits gourmands : le public acceptait cette polyvalence qui aujourd’hui encore me permet un éclectisme épanouissant.

Date de parution : mars 1999

Editeur : La Nuée bleue

Graphisme : Massin

127 pages

ISBN 978-2-7165-04744-1


Notice bibliographique BnF

print