Je cherchais un oiseau

Depuis quelques jours, me titillait l’envie de mettre en ligne un de mes poèmes préférés de Prévert.

Il s’agit du poème « Pour faire le portrait d’un oiseau » que j’ai traduit en alsacien et qui figure dans mon livre « Prévert en alsacien » (La Nuée Bleue).

Comment trouver une photo d’oiseau pour illustrer la publication ?

Je ne me voyais pas guetter dans la nature pour saisir au vol une photo subreptice d’oiseau.

« Les Oiseaux des Champs et des Bois », Carré en soie ivoire, grise et brune de 1954.

Mon appareil photo n’est d’ailleurs pas assez perfectionné pour s’adapter à la rapidité d’un oiseau.

Dans le meilleur des cas, en supposant qu’un oiseau se présente, qu’il reste patient devant mon objectif, j’aurais obtenu en ce mois de janvier une photo de grisaille, sans feuilles, sans verdure.

Devrais-je demander à Frantisek Zvardon de me prêter une de ses photos d’oiseaux ? Sans doute connaissez-vous le travail de ce passionné venu de Tchéquie, devenu Alsacien de coeur, sinon faites un tour sur son site et sur sa Page Facebook sur laquelle il publie chaque jour une photo éblouissante. Je ne vais pas enquiquiner l’aventurier avec ma petite demande, me suis-je dit.

Faire dessiner un oiseau par ma fille, Lucille Uhlrich, qui, à côté de son métier d’artiste, mène aussi une activité d’illustratrice sous le nom Lul ?

Je pensais à tout cela, sans gravité, légèrement, car je n’étais tenue à rien et n’avais aucune contrainte.

J’ai pris mon vélo et je me suis me rendue à mon rendez-vous pour partager un repas avec une amie de longue date, Pauline Pierson. Quel étonnement lorsque je vis qu’elle portrait un foulard autour du cou avec des dessins d’oiseaux, des oiseaux les uns plus merveilleux que les autres.

Wouaw, tes oiseaux, Pauline ! Comme ils sont beaux !

Ce sont les oiseaux de Hugo Grygkar, me répondit-elle.

Hugo Grygkar. Pour moi, ce nom ne signifiait rien. Pauline Pierson le connaissait. Elle est artiste et graphiste et enseigne aux Arts Décos à Strasbourg. (Les puristes fulmineront car je n’utilise pas la dénomination actuelle de l’école nommée HEAR, la Haute Ecole des Arts du Rhin).

« Les Oiseaux des Champs et des Bois », Carré en soie ivoire, grise et brune de 1954.

Hugo Grygkar, poursuit Pauline, est l’un des premiers dessinateurs des carrés Hermès. Il a fait les Beaux-Arts de Paris, je crois, et il était Hongrois à mon souvenir. C’est le dessinateur que je préfère car il a un talent fou et il a développé un graphisme particulier, très efficace, très pertinent, comme dans les affiches anciennes pour tous les thèmes chers à la maison Hermès. Comme j’ai fait beaucoup d’affiches je suis très sensible à son beau dessin. Je les collectionne pour cela et pour les montrer aux étudiants des Arts Décos. C’est un très beau travail plus qu’intéressant aussi pour l’histoire et une certaine façon d’inventorier toutes sortes d’animaux, d’objets, d’évènements, avec de l’humour, aussi afin que cela ne tombe pas dans les oubliettes du temps… J’AIME !

Bon il y a plein d’autres créateurs de foulards qui ont fait également un remarquable travail avec la maison Hermès, ajouta encore Pauline. C’est un monde à part dans la création et la mode.

Voilà que j’étais à mon tour dans l’enchantement.

Mésanges figurant sur le même carré Hermès de 1954.

Les oiseaux que voilà figurent sur le carré Hermès intitulé « Les Oiseaux des Champs et des Bois », Carré en soie ivoire, grise et brune de 1954.

Je suis rentrée à vélo. Sur la dizaine de kilomètres, je repensais aux oiseaux de Hugo Grygkar.

Une fois arrivée chez moi, j’ai trouvé ces renseignements sur le site Hymnes aux carrés.

 

Suite au lancement de son premier parfum en 1936, la maison Hermès a crée en 1937 le premier foulard pour fêter son 100e anniversaire.

C’était à la veille de la seconde guerre mondiale.

Coincé entre le développement de l’industrie automobile et la crise constante après la Grande dépression, la sellerie pariait sa survie sur la diversification de ses productions.

C’est dans ce contexte que l’Hugo Grygkar a dessiné le premier carré mémorable de la maison, « Jeu des Omnibus et des Dames Blanches ».

Par ailleurs, Chanel avait accompli une véritable révolution dans la mode féminine, en s’inspirant de l’univers masculin.

Pour ce nouveau style sobre et simple, le foulard était un accessoire parfait. Ayant le vent en poupe, Hermès a ainsi réussi à créer une grande vogue de foulards.

L’entente artistique entre la maison et Hugo va durer plus de 20 ans. Notamment, Hugo signera de nombreux chefs-d’œuvre, qui vont être réédités à maintes reprises à la postérité.

Classique comme peinture, moderne comme arts graphiques, le style d’Hugo est varié et difficile à résumer. Bref, style digne d’un pionnier, qui a marqué la genèse des carrés.

Et voilà, mes amis, je vous ai dit ce que je savais sur Hugo et ses oiseaux.

Et Prévert, dans tout ça, avec son poème « Pour faire le portrait d’un oiseau » ?

Je vous le proposerai un des ces jours, en V.O. et dans ma traduction en alsacien.

D’ici là, je souhaite que cela gazouille dans vos coeurs et dans vos vies.

Pour gazouiller, les Anglais disent to twit, oui , lorsque vous twittez (avec ou sans le…hashtag #), vous gazouillez en somme (-les gazouillis de réseaux sociaux ne sont pas toujours tendres, ni très poétiques-).

En alsacien, gazouiller se dit zwitschere.

Dann, güets Zwitschere.

Que cela gazouille pour vous.

 

 

 

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