La photo date d’avril 1979. J’étais alors partie en reportage à Castroville, au Texas pour la radio régionale qui s’appelait Radio Alsace, à l’invitation de l’association Alsace/Etats-Unis et de son président Gilbert Hadey. Les habitants de cette petite ville près de San Antonio, descendants d’Alsaciens partis de leur terre au 19e siècle, continuaient six générations plus tard à parler l’alsacien sans jamais avoir mis les pieds en cette région. Des contacts furent noués entre la grande et le petite Alsace, des jumelages eurent lieu à partir de 1978 entre Castroville et le village haut-rhinois Niederentzen, entre D’Hanis et la commune d’Oberentzen.
Léon Beyer, viticulteur et maire d’Eguisheim était de ce voyage ainsi que son épouse aussi présente sur la photo. J’accompagnais ce voyage d’une semaine pour rapporter une vingtaine de reportages pour Radio Alsace, la radio régionale.
Vous noterez que le micro est siglé « FR3 Alsace ». La télé alors ? Non, la radio. C’est qu’en ce temps-là radio et télévision faisaient partie de la même famille nommée FR3 Alsace. La radio était alors située place de Bordeaux dans ce qu’on appelle encore aujourd’hui « la maison de la radio » (alors que la radio n’y est plus depuis 1983, lorsque les radios régionales furent places sous le giron de Radio France).
Cela semblait à l’époque si naturelle de partager, entre radio et télé, le même lieu, les mêmes forces, les mêmes hommes.
Avec ces ordres venus de Paris, il a fallu scinder de force cet équilibre-là, créer des fractures humaines, sans parler de la gabegie d’énergie et d’argent.
Le 1er janvier 1983, la partie radiophonique de FR3 Alsace fut rattachée à la société Radio France qui prit les radios régionales sous sa tutelle. La radio fut alors nommée « Radio France Alsace ».
Trente-cinq ans plus tard, on constata l’erreur de cette décision. Aujourd’hui radio et télévision régionales sont amenées à se rapprocher : de plus en plus les émissions radio sont diffusées conjointement à la télévision. C’est dans l’air du temps, selon un souhait qui tient à coeur à la présidence de la République.
J’ai vécu l’avant et l’après de cette décision de séparer en 1983 radio et télé, son incroyable gâchis. Et je me dis que la vie est faite de cycles qui, lorsqu’ils ont bouclé la boucle, refont parfois marche arrière.
C’est aussi une façon d’avancer, même si elle n’est pas la plus rationnelle.