
Mon instituteur à l’école du village (en cours élémentaire 1 et 2) fut Marcel Neusch, un homme élégant et calme que j’ai adoré. Après Mademoiselle Jerome (l’institutrice qui m’accueillit à six ans alors que je ne parlais pas un mot de français), Monsieur Neusch m’a fait découvrir la beauté de l’écriture et la joie des livres. Lorsque je vois sa calligraphie pour l’écriture de mon nom au haut du cahier, je la reconnais d’emblée et je revois son visage et sa silhouette avec précision.
J’ai retrouvé cette rédaction faite à huit ans. En la lisant je me rends compte que ces lignes contiennent déjà l’amour de la nature qui restera un lumignon tout au long de ma vie. Je note aussi l’exigence des maitres d’école d’alors quant à la calligraphie. Celle-ci devait être régulière et sans ratures.
Le maître d’école avait aussi l’exigence d’une écriture sans faute. Je note que j’y suis parvenue.
En relisant le texte, j’ai pris conscience que j’adhérais toujours encore à ce que je pensais comme fillette : j’aime toujours les clématites, les roses, les pêches et le raisin. Lorsque je lis la phrase : L’eau me vient à la bouche quand j’admire le gros chou-fleur immaculé dont les feuilles sont rabattues, j’ai la nostalgie du geste à faire pour éviter que le chou-fleur ne monte en floraison, à savoir craquer les feuilles supérieures pour lui faire une capeline.
Il y a ma phrase de conclusion que je revendique toujours encore, comme à 9 ans, et que je rêve de pouvoir dire chaque soir : Toute contente je vais au lit et je songe.
La note donnée fut 8,5 sur 10. C’est une bonne note mais elle aurait pu être revue à la hausse, étant donné l’absence de fautes et de ratures. C’était parfait ainsi : Monsieur Neusch savait qu’il fallait agir avec exigence pour maintenir vivant en nous le sens de l’effort, ce moteur miraculeux qui fait de nous des êtres utiles.
Post scritpum
Je sais qu’il faudrait dire « professeur des écoles » au lieu de « maître d’école » ou « d’instituteur » mais je n’aime pas ce terme.



