Le Château de l’Ile à Ostwald souffle 25 bougies

Château de l’Ile ou de l’Ill ?

Les deux orthographes seraient adaptées mais lorsque la famille Traversac a acheté ce lieu historique pour le transformer en 1995 en l’hôtel-restaurant 4 étoiles Château de l’Ile, elle opta pour le mot « Ile » car ce château est construit sur une île entourée par les bras de l’Ill, la rivière qui traverse l’Alsace du sud au nord pour se jeter dans le Rhin.

En cet endroit situé dans le coeur du vieil Ostwald, l’Ill se divise et enserre avec romantisme cet ilot arboré de 4 hectares devenu un des fleurons de la famille Traversac.

Le Château de l’Ile autrefois lorsqu’il se nommait « Schloss Inselburg »

Dire que cette île a failli disparaitre à maintes reprises, notamment dans les années 1970, où revint l’élan de la rattacher à la terre ferme en remblayant le bras de l’Ill qui contourne en boucle le château.

Ce projet heureusement ne vit pas le jour. Longtemps les riverains se demandaient ce qu’il adviendrait de cette « belle au bois dormant » que les ronces couvraient de plus en plus. Dans les années 80 circulèrent diverses rumeurs de rachat, comme le rappela Jean-Marie Beutel, le maire d’Ostwald, lors de la fête qu’organisa l’hôtel-restaurant le 5 mai 2019 pour souffler ces 25 bougies.

L’équipe du Château de l’Ile © Dorian BRAULT

Une grande firme d’articles de sport devait en faire son siège. Le journaliste et essayiste Jean-François Kahn s’y intéressa aussi pour y installer le siège national du Club de la Presse. Les coûts de restauration effrayèrent plus d’un. Jusqu’à l’avènement de l’achat de ce lieu historique par la famille Traversac.

Cette famille possède plusieurs « châteaux hôtels » au sein de la chaîne Les Grandes Étapes Françaises, selon un concept inventé dans les années 50 par René Traversac, ingénieur des arts et métiers, qui regrettait de ne pouvoir trouver dans les hôtels un style mêlant douceur et art de vivre. Sa première acquisition fut une demeure renaissance d’Anjou qu’il aménagea en l’hôtel Le prieuré.

Le Château de l’Ile en 1992 lors de la restauration entreprise par la famille Traversac et sa chaîne Les Grandes Etapes Françaises

D’autres lieux historiques furent transformés par cette famille, notamment ce château d’Ostwald qu’elle acquit en 1993 et que les anciens Ostwaldois désignaient encore sous le terme d’origine ‘s Inselburjer Schloss.

Ostwald, commune située à 8 kilomètres au sud de Strasbourg, s’appelait autrefois Illwickersheim, ce qui atteste combien la présence de la rivière était importante en ce quai Heydt, quai historique qui est le coeur de la ville.

Sur ce même quai se trouve l’imposant tilleul planté en 1848 pour fêter l’avènement de la seconde République. Cet « arbre de la Liberté » est proche de la chapelle du cimetière qui est en fait le choeur de la première église d’Ostwald construite au XIIIe siècle.

Des maisons à colombages du 17e et et 18e siècle bordent le quai.

Parmi les animations proposées lors de l’anniversaire du 5 mai, il y eut les promenades en calèche faites par Céline SCHWOOB © Dorian BRAULT

Situé au bord d’une voix fluviale, lieu de pêche, de joutes et de baignades, le château de l’Ile a connu une histoire riche, bouleversée, à l’image de l’Alsace, qui changea si souvent de nationalités.

La forteresse fut créée au 13e siècle par Frédéric II, roi de Germanie, sacré Empereur à Rome qui était aussi propriétaire de Strasbourg et des terres voisines et qui, pour assurer la défense sud de la Ville, a fait construire ce château qui fut nommé Illwickersheim. Puis un village fut construit autour de lui qui porta le même nom, rappelant sa présence au bord de l’Ill, avant d’opter, en 1840 pour le nom d’Ostwald (qui signifie « forêt de l’est »).

Le Château de l’Ile tel qu’on le connait aujourd’hui © Christophe BIELSA

En 1891, Léonard Heydt, un chef d’entreprise qui fit fortune avec une entreprise de travaux publics, maire d’Ostwald de 1861 jusqu’à son décès en 1901, acheta le château, le restaura, le transformant en une belle villa, entourée d’arbres rares. Sur ce bâtiment historique, préservée lors de la restauration par la famille Traversac, on peut lire, sculpté dans le grès cette inscription en allemand Renoviert durch Leonard Heydt (rénové par Leonard Heydt) qui rappelle qu’en ce temps-là l’Alsace était prussienne.

En 1918, le château fut racheté par Jean Darbois, un commerçant en cristallerie et faïence à Forbach. Son fils, René Darbois, qui fut maire d’Ostwald de 1936 à 1940, agrandit les constructions, ajoutant quelques bâtiments au château pour y installer une tisanerie, nommée Schloss Inselburg Tee (les thés du Château de l’Ile). Une quinzaine de tisanes y étaient élaborée, essentiellement des mélanges qui avaient vertus de soulager le diabète, les calculs biliaires, les maladies dermatologiques et respiratoires.

Ces tisanes reçurent en 1933 le Grand Prix de la Foire Européenne. René Darbois ouvrira même un restaurant au rez-de-chaussée du château.

Devant le gâteau d’anniversaire préparé par l’équipe de Yannick MATTERN, de gauche à droite, Marie-Reine FISCHER (Présidente de l’Agence Régionale du Tourisme Grand Est), Jean-Luc HEIMBURGER (Président de la CCI), Pierre et Sophie TRAVERSAC (PDG des Grandes Etapes Françaises), Jean-Marie BEUTEL (Maire d’Ostwald) et Bernard URBAIN (directeur du Château de l’Ile) © Dorian BRAULT

Les bombardements aériens du 25 septembre 1944 détruisirent sept tonnes de matières premières et portèrent un coup à la tisanerie. Après quelques autres revers, la tisanerie Schloss Inselburg Tee mettra les clefs sous la porte en 1948.

Le château entra alors dans son long sommeil. Dans les années 1970, la commune prit conscience de la beauté de ce noyau antique et commença à valoriser le quai Heydt pour en faire un lieu de promenade.

Et puis en 1991, on apprit qu’après 43 ans de fermeture, le château, acquis par la famille Traversac, allait être restauré et agrandi. Avec ses 62 chambres, son restaurant gastronomique, sa winstub, sa terrasse, son spa, ses salons pour des réceptions privées et professionnelles, il reçoit des voyageurs venus du monde entier, qui peuvent flâner dans l’espace arboré de 4 hectares, ceint par les flots de l’Ill.

Avant l’inauguration en 1994, les habitants de la commune ont eu le privilège de découvrir en avant-première le château-hôtel, avec Christian Pierre Brandt, le premier directeur, qui fit le guide ce jour-là. Olivier Voarick lui succéda en 2002, suivi en 2007 par Armel de Laage de Meux, puis en 2010 par l’actuel directeur Bernard Urbain, qui dirigeait le Château d’Isenbourg à Rouffach et qui prit les commandes des deux établissements, assisté au Château de l’Ile par Sylvia Schwab.

Bel anniversaire et longue vie au Château de l’Ile !

Avoir 25 ans en un château du XIXe siècle bâti sur des vestiges du Moyen-Age, voilà la plus belle des modernités.

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