Retour à Bellagio

Dès mon arrivée à Bellagio, sur les rives du Lac de Côme, j’ai pris spontanément la plume pour mettre mes plaies sur du papier et essayer de voir clair en elles. Les premiers mots écrits d’instinct furent : « Retour à Bellagio ». Pourquoi « retour » me disais-je au même moment, alors que je venais seulement d’arriver ? Je ne savais pas que je reviendrais un an après, pour boucler une boucle. J’ignorais en entamant mes textes sur le deuil d’une pièce, que j’en viendrais à évoquer le deuil des êtres aimées et que, sur ces mêmes sillons, j’aurais à affronter la mort du peintre Camille Claus puis celle de Jean-Marie Boehm, le directeur des programmes de la télévision régionale. J’écrivais au jour le jour pour narrer des instants d’apparence anodine du quotidien. J’écrivais sans rien attendre et l’inattendu me vint comme un cadeau : cette écriture sur un an mit en évidence les passerelles entre les deuils, révélant avec une intensité à la fois douce et violente les petits liens que tisse la vie.

Extrait

Bellagio, cité ocre et bois de rose où vient s’immoler ma sensibilité. J’y revis avec acuité des moments à fleur de peau. Maman, mon amour, je ne finirai jamais de t’aimer. Et si tu croises dans le vallonnement des nues, le visage de Papa, étreins son corps comme jamais je n’ai osé le faire. Dis-lui qu’il est celui que j’ai le plus aimé, qu’il est l’homme qui me manque le plus. Et vous, abeilles, cétoines et bourdons vrombissants, alliez-vous pour ce ballet commun qui signifiera aux âmes en allées cet amour que nous n’avons su leur donner de leur vivant et qui sans fin s’immole en nos côtes.

Parution : printemps 2007

La Nuée Bleue

Le livre donna aussi une pièce de théâtre mise en scène par Patrick Chevalier.

Voir ce lien :  https://www.simonemorgenthaler.com/piece-retour-a-bellagio/


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