À demain à New York

À demain à New York, une correspondance sur Internet avec Renée Roth-Hano © Couverture Massin

Le mercredi 27 juin 2001, je recevais pour la première fois un courriel de Renée Roth-Hano, une Alsacienne que je souhaitais rencontrer de longue date car j’avais apprécié son livre « D’un monde à l’autre » (La Nuée Bleue), dans lequel elle narrait comment elle avait quitté l’Alsace après-guerre pour rallier New York et s’y refaire une vie après avoir été « enfant caché » dans un couvent normand, avec ses sœurs, où elles avaient changé leur religion juive contre la catholique pour échapper aux rafles et aux camps de concentrations.

J’ai d’emblée éprouvé un sentiment d’amitié très fort pour cette femme que je ne connaissais pas, avec laquelle j’ai correspondu quotidiennement. Nous devions nous rencontrer rapidement et puis les attentats du 11 septembre ont modifié la donne. Nous avons donc continué à nous envoyer nos messages électroniques, doux comme des lettres, en évoquant nos enfances, nos parents, nos amis morts ou mourants, la beauté des roses ou Ella Fitzgerald, à échanger des recettes de cuisine ou des confidences, jusqu’au jour bouleversant entre tous où nous sommes reconnues dans une rue de New York grâce à l’écharpe que Renée m’avait envoyée pour Noël et que je portais au cou.

En relisant la masse de courriers échangés, j’ai trouvé qu’il y avait là une manne vivante, touchante de sincérité, de vérité et de tendresse. Et que le souffle de cette fulgurante amitié pouvait toucher le lecteur.

 

Extrait

 

La foule va. Le trottoir bruisse de vie. « C’est mon écharpe ». Une femme a parlé. Elle vient de dire cette phrase. Elle marchait dans la foule en sens inverse. Elle s’arrête net devant Simone. « C’ est mon écharpe. Je la reconnais ».
– Renée ?
– Simone ?

Elles sont deux femmes qui se serrent l’une contre l’autre. Sur un trottoir. Dans une ville de vingt millions d’habitants. Elles se sont rencontrées comme çà.
Par hasard. Par une écharpe. Elles se voient pour la première fois. Elles ont l’impression de se connaître bien. Et leurs pensées font des houles comme l’Atlantique par grand vent. Et le ciel est toujours aussi bleu.

Aujourd’hui, Renée reste ma merveilleuse amie qui vit si loin de cette Alsace qui l’a vue naître. Je continue à l’appeler Little Darling et elle m’appelle toujours Simonette.

A demain à New York, La Nuée Bleue (2003)

print