Le bleu de la chicorée sauvage

Wìlder Àndifi, Zichori

Fleur de chicorée sauvage © Simone Morgenthaler

Elle fleurit de juin à octobre.

On la trouve dans les prairies, les prés rocailleux, terrains vagues, les friches, les bords des routes, dans les terrains secs et calcaires

On peut manger ses jeunes feuilles, ses boutons floraux, ses fleurs et ses racines.

J’aime éperdument le bleu de la chicorée sauvage, parfois appelée écoubelle bleue, fiancée du soleil, chicorée à café, chicorée amère

En alsacien, on l’appelle wilder Àndifi ou Zichori. 

La langue allemande est riche en termes : Wegwarte, Gemeine Wegwarte, Wegtritt, blaue Distel, Kaffeezichorie, Sonnenkraut, Sonnenwedel, Sonnenwirbel, Wegwächter, Wilde Zichorie, Zichorie

Ses fleurs bleu azur sont toujours dirigées vers le soleil. Il faut les admirer tôt, à partir de six heures et jusqu’à midi. Elles se ferment à mi-journée.

Ses fleurs se joignent aux salades et, en décor,  aux mets salés autant que sucrés. Récoltez, tôt au printemps, avant la floraison, les feuilles en rosette à la base. Vite amères, elles sont bonnes lorsqu’elles sont jeunes et tendres. Elles accompagnent, à petite dose, les salades.

Cuites, elles s’ajoutent aux soupes. Les boutons floraux se conservent au vinaigre. Ses racines cuites se consomment avec du beurre. Séchées et torréfiées, elles donnent la chicorée, un ersatz de café bien connu.

Pour être transformé en chicorée, ses racines (noires à l’extérieur et blanches à l’intérieur) sont cueillies tard à l’automne, en novembre. Après nettoyage, elles sont séchées, hachées puis torréfiées. Infusée, cette chicorée est excellente mélangée avec du lait auquel elle donne un goût noiseté et caramélisé. Un peu passée de mode, la chicorée, boisson sans caféine et était beaucoup consommée jadis, surtout dans le nord de la France.

La chicorée sauvage se métamorphose aussi de façon spectaculaire en chicons, ou Witloof, cette salade d’hiver nacrée et jaune pâle. Ses racines déterrées sont forcées et blanchies en cave. Elles font naître alors la « perle du Nord ». Sinon, laissée dans la nature, elle fait fleurir ses corolles bleu azur aux extrémités dentées.

Cette « fiancée du soleil », aimée de ceux qui ne craignent pas l’amertume, est classée parmi les 1000 plantes nuisibles des champs de culture. L’Allemagne l’a réhabilitée en la désignant comme plante de l’année 2009.

J’ai vu, lors d’un printemps en Crète, des paysannes qui vendaient ses feuilles fraîches au marché couvert de La Chanée. Les Crétoises les font cuire à l’eau, ce qui leur ôte une part d’amertume, et ensuite elles les parfument à l’huile d’olive.

J’ai quelquefois déterrées des plants de chicorée pour leur beauté, pour les transplanter dans mon jardin, mais sans succès. Ils se contentent d’une terre pauvre et sèche, poussent où bon leur semble et n’apprécient guère qu’on leur inflige un mode de vie éloigné de leur minimalisme.

Dans le livre La cuisine naturelle des plantes d’Alsace (La Nuée Bleue) que j’ai co-écrit avec Hubert Maetz, le chef de du Rosenmeer propose des recettes que cette plante sauvage lui a inspiré, notamment :
– une salade de jeunes feuilles de chicorée
– des boutons de fleurs de chicorée au vinaigre de miel qui se consomment avec la charcuterie
– des pommes de terre dorée sur un lit de gros sel, agrémentée d’œufs brouillées à la ciboulette et chicorée
– de l’agneau à la chicorée comme en Grèce et des madeleines salées aux fleurs de chicorée.

Avouez qu’il est difficile de résister à de si beaux intitulés.

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